J'utilise rarement l'oxygène, elle provoque la rouille
(première publication sur Zazieweb en décembre 2005)
Tout ou presque sur ces créations étonnantes, de l'Antiquité à 2005, du mythe crétois du géant Talos en 2000 avant notre ère, jusqu'à l'exposition universelle qui eut lieu cette année à Aichi, au Japon.
Chantal Leguay est réalisatrice multimédia et rédactrice. Elle a réussi le parfait ouvrage de vulgarisation sur un sujet complexe car il n'est pas donné de saisir la distinction entre robotique, cybernétique, intelligence artificielle, réseaux neuronaux, systèmes experts, systèmes multi-agents, architecture à subsomption, connexionnisme... Eh bien, c'est le cas ici et en seulement 150 pages.
Avec illustrations et exemples (sans oublier, pour chaque cas, des liens sur le web), du plus sérieux au plus fou.
Pour le sérieux : les robots industriels, nés aux USA puis devenus l'un des fers-de-lance de l'ingénierie nippone (on en compte près d'un million au Japon contre à peine 30000 en France).
Pour le plus dingue : la performance de l'artiste du mouvement Fluxus Nam June Paik qui, en 1964 crée le Premier accident du 21° siècle en poussant un robot sous une voiture puis en emportant les restes sur une civière jusqu'à un musée !
Plutôt que de tenter d'imiter les humains, la recherche actuelle se penche davantage sur le comportement animal et on s'est également aperçu qu'un robot évoluait mieux par l'apprentissage et une forme de simulation de la sélection naturelle que par la simple programmation pure et dure.
A noter la différence d'appréhension de l'image des robots au Japon (plutôt bienveillants*) et en Occident (nettement plus inquiétants) qui vient en partie de la tradition et du succès phénoménal du manga Astroboy.
J'aimerais pouvoir citer tous les exemples fournis par ce livre passionnant qui tient presque dans la poche. Alors ce sera en vrac : les clepsydres-automates d'al-Jazari ; les Karakuri-Ningyô japonais du 17° siècle (qui à la différence des automates français, ne comportaient aucune pièce métalliques) ; le renard électronique d'Albert Ducrocq (journaliste scientifique qui fut aussi un des pionniers de l'intelligence artificielle) ; le Cyberson, une coccinelle-jouet qui se commandait à l'aide d'un sifflet mais n'en faisait qu'à sa tête ; la... longue marche pour obtenir un robot capable de se mouvoir sur deux jambes ; le BioWall, mur constitué de cellules artificielles auto-réparatrices...
Je suis un peu moins enthousiaste sur les récents robots-jouets et de compagnie, certains robots-musiciens et les compétitions de Battlebots que je trouve un peu crétins sur les bords mais j'aime bien par contre ces micro-robots de la taille de gros insectes.
Chantal Leguay n'oublie évidemment pas de commenter les écrits et films majeurs sur les robots et androïdes, du Traité des automates de Héron d'Alexandrie il y a 2000 ans en passant par Villiers de L'Isle-Adam, Frankenstein, le séminal R.U.R. du tchèque Karel Capek (pièce de théâtre de 1920 qui lancera le terme robot), Metropolis, Isaac Asimov, Philip K. Dick, Planète interdite, Mondwest, Terminator (elle aurait juste pu ajouter Robocop)...
Voilà, il ne vous reste plus qu'à faire le fameux test de Turing afin de discerner si votre interlocuteur est de chair ou de circuits imprimés. Attention, certaines réponses peuvent induire en erreur et sembler celles d'un énarque ("je vais répondre à votre question, mais auparavant j'aimerais revenir sur un point précédent..."), d'un père jésuite (si vous connaissez la blague "Pourquoi répondez-vous toujours à une question par une question ?" "Et pourquoi pas ?") ou d'un sélectionneur d'équipe sportive ("C'est vous qui le dites").
Le robot le plus parfait ne reste-t-il pas l'homo sapiens ? Programmé par son ADN puis par son environnement, doté à la fois d'une grande capacité d'apprentissage, d'un formidable don d'imitation et de deux terminaisons à cinq branches extrêmement habiles, il a de plus la faculté innée de se conformer à un moule. Seul hic : il ne répond hélas à aucune des trois lois d'Asimov.
(*) Il faut absolument voir le fascinant (et parfois inquiétant) documentaire Les robots affectueux (Mechanical Love en v.o.) réalisé par la danoise Phie Ambo en 2007 et que diffusa France 3 l'an dernier (cf extrait). Elle a suivi les récents travaux de cybernéticiens japonais qui mettent au point des robots de compagnie mais en poussant le réalisme autrement plus loin que le très simpliste Aïbo. D’abord avec la grosse peluche Paro (prononcer « palo » comme « pal », « copain » en anglais), un bébé phoque bourré de capteurs sensoriels que l’on a proposé à des personnes âgées afin d’améliorer leur quotidien. Le contact de Paro aurait donné quelques résultats positifs dans le cas de démence sénile.
Mais l’expérience la plus dérangeante est celle menée par le professeur Hiroshi Ishiguro (responsable de l'Intelligent Robotics Laboratory d'Osaka) qui a conçu des copies cybernétiques de sa propre famille. Sa démarche frôle un certain sadisme lorsqu’il confronte d’abord sa fille à son double (un moment qui rappelle le documentaire Svyato du russe Victor Kossakovsky où le cinéaste filma la première confrontation de son fils de 2 ans avec son reflet dans une glace) et plus encore lorsqu’il la filme seule dans la pièce où le robot Ishiguro est assis, s’exprimant à distance avec la voix de son créateur. Dommage que Philip K. Dick ne soit plus là pour donner son avis tant ce documentaire impressionnant aurait pu s’intituler « Can human beings dream of electric sheep ? » La veille, par un hasard lui aussi troublant, une autre chaîne re-diffusa Blade Runner...
Les Robots, une histoire de la robotique, de Chantal Leguay
IMHO
ISBN 2915453128 / 9782915453126
19 €
Présentation de l'éditeur :
Du corps humain à l’espace, des laboratoires aux salles de cinéma, les robots occupent une place de plus en plus prépondérante dans la vie humaine. Pour découvrir l’évolution de ces machines, diverses, remarquables, inattendues, Les Robots, une histoire de la robotique donne une vision globale et claire de cet univers à travers des axes chronologiques, thématiques et lexicaux. Avec la participation de Frankenstein, les tortues de Grey Walter, Astro Boy, Robby le Robot, Unimate, Robote K 456, Shakey, Wabot, Robosaurus, Sojourner, PaPeRo, Psikharpax...
L'auteure :
Chantal Leguay, réalisatrice multimédia et rédactrice, s’attache à rendre la robotique et son histoire accessibles à un large public, à travers des projets de livres et de sites.
Liens :
Présentation de l'album avec des extraits
Pour retrouver tous les liens cités dans le livre et l'actualité de la robotique
La boutique des robots
Automates Intelligents, le portail de l'intelligence artificielle. C'est du costaud !
L'antenne "A.I." du M.I.T. (en anglais). Mieux vaut ne pas avoir sécher les maths au lycée !
Tout ou presque sur ces créations étonnantes, de l'Antiquité à 2005, du mythe crétois du géant Talos en 2000 avant notre ère, jusqu'à l'exposition universelle qui eut lieu cette année à Aichi, au Japon.
Chantal Leguay est réalisatrice multimédia et rédactrice. Elle a réussi le parfait ouvrage de vulgarisation sur un sujet complexe car il n'est pas donné de saisir la distinction entre robotique, cybernétique, intelligence artificielle, réseaux neuronaux, systèmes experts, systèmes multi-agents, architecture à subsomption, connexionnisme... Eh bien, c'est le cas ici et en seulement 150 pages.
Avec illustrations et exemples (sans oublier, pour chaque cas, des liens sur le web), du plus sérieux au plus fou.
Pour le sérieux : les robots industriels, nés aux USA puis devenus l'un des fers-de-lance de l'ingénierie nippone (on en compte près d'un million au Japon contre à peine 30000 en France).
Pour le plus dingue : la performance de l'artiste du mouvement Fluxus Nam June Paik qui, en 1964 crée le Premier accident du 21° siècle en poussant un robot sous une voiture puis en emportant les restes sur une civière jusqu'à un musée !
Plutôt que de tenter d'imiter les humains, la recherche actuelle se penche davantage sur le comportement animal et on s'est également aperçu qu'un robot évoluait mieux par l'apprentissage et une forme de simulation de la sélection naturelle que par la simple programmation pure et dure.
A noter la différence d'appréhension de l'image des robots au Japon (plutôt bienveillants*) et en Occident (nettement plus inquiétants) qui vient en partie de la tradition et du succès phénoménal du manga Astroboy.
J'aimerais pouvoir citer tous les exemples fournis par ce livre passionnant qui tient presque dans la poche. Alors ce sera en vrac : les clepsydres-automates d'al-Jazari ; les Karakuri-Ningyô japonais du 17° siècle (qui à la différence des automates français, ne comportaient aucune pièce métalliques) ; le renard électronique d'Albert Ducrocq (journaliste scientifique qui fut aussi un des pionniers de l'intelligence artificielle) ; le Cyberson, une coccinelle-jouet qui se commandait à l'aide d'un sifflet mais n'en faisait qu'à sa tête ; la... longue marche pour obtenir un robot capable de se mouvoir sur deux jambes ; le BioWall, mur constitué de cellules artificielles auto-réparatrices...
Je suis un peu moins enthousiaste sur les récents robots-jouets et de compagnie, certains robots-musiciens et les compétitions de Battlebots que je trouve un peu crétins sur les bords mais j'aime bien par contre ces micro-robots de la taille de gros insectes.
Chantal Leguay n'oublie évidemment pas de commenter les écrits et films majeurs sur les robots et androïdes, du Traité des automates de Héron d'Alexandrie il y a 2000 ans en passant par Villiers de L'Isle-Adam, Frankenstein, le séminal R.U.R. du tchèque Karel Capek (pièce de théâtre de 1920 qui lancera le terme robot), Metropolis, Isaac Asimov, Philip K. Dick, Planète interdite, Mondwest, Terminator (elle aurait juste pu ajouter Robocop)...
Voilà, il ne vous reste plus qu'à faire le fameux test de Turing afin de discerner si votre interlocuteur est de chair ou de circuits imprimés. Attention, certaines réponses peuvent induire en erreur et sembler celles d'un énarque ("je vais répondre à votre question, mais auparavant j'aimerais revenir sur un point précédent..."), d'un père jésuite (si vous connaissez la blague "Pourquoi répondez-vous toujours à une question par une question ?" "Et pourquoi pas ?") ou d'un sélectionneur d'équipe sportive ("C'est vous qui le dites").
Le robot le plus parfait ne reste-t-il pas l'homo sapiens ? Programmé par son ADN puis par son environnement, doté à la fois d'une grande capacité d'apprentissage, d'un formidable don d'imitation et de deux terminaisons à cinq branches extrêmement habiles, il a de plus la faculté innée de se conformer à un moule. Seul hic : il ne répond hélas à aucune des trois lois d'Asimov.
(*) Il faut absolument voir le fascinant (et parfois inquiétant) documentaire Les robots affectueux (Mechanical Love en v.o.) réalisé par la danoise Phie Ambo en 2007 et que diffusa France 3 l'an dernier (cf extrait). Elle a suivi les récents travaux de cybernéticiens japonais qui mettent au point des robots de compagnie mais en poussant le réalisme autrement plus loin que le très simpliste Aïbo. D’abord avec la grosse peluche Paro (prononcer « palo » comme « pal », « copain » en anglais), un bébé phoque bourré de capteurs sensoriels que l’on a proposé à des personnes âgées afin d’améliorer leur quotidien. Le contact de Paro aurait donné quelques résultats positifs dans le cas de démence sénile.
Mais l’expérience la plus dérangeante est celle menée par le professeur Hiroshi Ishiguro (responsable de l'Intelligent Robotics Laboratory d'Osaka) qui a conçu des copies cybernétiques de sa propre famille. Sa démarche frôle un certain sadisme lorsqu’il confronte d’abord sa fille à son double (un moment qui rappelle le documentaire Svyato du russe Victor Kossakovsky où le cinéaste filma la première confrontation de son fils de 2 ans avec son reflet dans une glace) et plus encore lorsqu’il la filme seule dans la pièce où le robot Ishiguro est assis, s’exprimant à distance avec la voix de son créateur. Dommage que Philip K. Dick ne soit plus là pour donner son avis tant ce documentaire impressionnant aurait pu s’intituler « Can human beings dream of electric sheep ? » La veille, par un hasard lui aussi troublant, une autre chaîne re-diffusa Blade Runner...
Les Robots, une histoire de la robotique, de Chantal Leguay
IMHO
ISBN 2915453128 / 9782915453126
19 €
Présentation de l'éditeur :
Du corps humain à l’espace, des laboratoires aux salles de cinéma, les robots occupent une place de plus en plus prépondérante dans la vie humaine. Pour découvrir l’évolution de ces machines, diverses, remarquables, inattendues, Les Robots, une histoire de la robotique donne une vision globale et claire de cet univers à travers des axes chronologiques, thématiques et lexicaux. Avec la participation de Frankenstein, les tortues de Grey Walter, Astro Boy, Robby le Robot, Unimate, Robote K 456, Shakey, Wabot, Robosaurus, Sojourner, PaPeRo, Psikharpax...
L'auteure :
Chantal Leguay, réalisatrice multimédia et rédactrice, s’attache à rendre la robotique et son histoire accessibles à un large public, à travers des projets de livres et de sites.
Liens :
Présentation de l'album avec des extraits
Pour retrouver tous les liens cités dans le livre et l'actualité de la robotique
La boutique des robots
Automates Intelligents, le portail de l'intelligence artificielle. C'est du costaud !
L'antenne "A.I." du M.I.T. (en anglais). Mieux vaut ne pas avoir sécher les maths au lycée !